Comment attirer et recruter les jeunes diplômés ?

Avec la crise actuelle, les jeunes diplômés sont plus que jamais en quête de sens. Le « sens » renvoie à l’idée de direction, ce qui relie un point de départ à un point d’arrivée et donne sens à un parcours.

Quoi que nous fassions, nous agissons toujours dans un but précis, en orientant nos actes dans une certaine direction. Sartre a beaucoup insisté sur la notion de projet, exister c’est se projeter, se jeter en avant pour rendre nos actes signifiants.

Prise de conscience écologique et sociale, nouveau sentiment de responsabilité, nombreux sont les jeunes diplômés qui souhaitent avant tout exercer un travail qui a du sens ou qui a un impact, avec une utilité sociale ou une influence jugée positive sur la société. Quitte à rogner sur leurs prétentions salariales ou renoncer au prestige d’une entreprise reconnue. Selon le dernier baromètre BCG-CGE-Ipsos qui date de janvier, sept jeunes interrogés sur dix aimeraient travailler ou faire un stage dans l’ESS.

La crise sanitaire et économique, qui n’épargne ni le secteur de l’ESS ni les emplois des jeunes, va-t-elle exacerber cette tendance ? Elle semble accélérer l’envie de s’engager dans cette direction. En témoigne l’explosion du nombre de visiteurs sur le site d’emplois de Makesense, association qui rassemble notamment des offres d’emplois dans l’économie sociale. Au sortir du premier confinement, 90 % des salariés jugeaient important, voire essentiel que leur entreprise « donne un sens à leur travail », selon le 14e Observatoire social de l’entreprise (CESI-Ipsos-Les Echos).

Actuellement, les jeunes diplômés vont donc chercher dans le monde de l’entreprise quelque chose qui fait sens pour eux en se posant différentes questions. Le type d’activité correspond-il à ce que j’aime, ce en quoi je crois ? Les produits fabriqués sont-ils écologiques pour les Hommes et pour la planète ? Le processus de fabrication est-il responsable ? Les valeurs de l’entreprise sont-elles compatibles avec les miennes ?

Ils vont tenter par leur travail de répondre à leur mission de vie : « à quoi je contribue profondément en me rendant dans cette entreprise tous les matins » ? Les jeunes diplômés étant à la recherche d’un mieux-être, ils chercheront instinctivement à intégrer une entreprise avec des valeurs proches des leurs.

Du côté des entreprises, le sujet des valeurs est un enjeu fort puisque la satisfaction des systèmes de valeurs est une des clés fondamentales de la motivation. Par ce biais, elles peuvent attirer de nouveaux talents

En tant qu’entreprise, petite, moyenne ou grande, s’engager sur le sujet de la « Responsabilité Sociétale des Entreprises » (RSE) peut être un levier important pour attirer les jeunes diplômés qui vont de plus en plus vers des entreprises vertueuses, respectueuses de leur environnement, des Hommes et de leur territoire. Mais pour cela, l’engagement doit être sincère et fort au niveau stratégique. Il ne s’agit pas de se contenter d’une communication avec des messages forts sans la mise en place d’actions réelles. En effet, les conséquences d’une marque employeur idéalisée sont nombreuses : baisse de l’implication, perte en efficacité, évidemment augmentation du turn-over, et donc une perte de temps et d’argent liée aux remplacements ainsi qu’à long terme, une baisse de l’attractivité.

Conseils pour réussir sa politique RSE

 

Pour que les valeurs humaines, environnementales et sociétales soient incarnées, il faut tout d’abord que le dirigeant porte sincèrement ces engagements jusqu’à les inclure profondément dans une stratégie d’entreprise à moyen, voire long terme. Oui, il y a des investissements à faire, mais le bénéfice que cela rapporte aux entreprises n’est plus à prouver. En effet, l’image est valorisée, les performances commerciales sont améliorées, les attentes des clients sont davantage écoutées, les produits sont optimisés, l’innovation est encouragée et in fine, d’importantes économies peuvent être faites… Mais pour obtenir des résultats, il faut allouer des moyens.

Ensuite, les valeurs doivent être portées par les salariés. C’est un travail de longue haleine pour que l’engagement soit incarné collectivement par les collaborateurs. La RSE doit être visible dans l’entreprise par des actions quotidiennes pour faire changer les mentalités en profondeur. Des ateliers de sensibilisation et des formations sont nécessaires pour ancrer les pratiques dans le quotidien. Pour cela, il est primordial de donner du sens à la « RSE » et que les collaborateurs puissent fait le lien avec leur vie personnelle. Elle doit être au centre des politiques qualité, commerciale, achat, RH et management. La construction des politiques doit se faire collégialement. Elle doit aussi apparaître dans tous les messages de communication interne. Tous les services doivent y croire et agir en ce sens.

Pour redorer l’image des entreprises de l’agroalimentaire, l’engagement dans les sujets de la RSE semble plus que jamais faire sens, autant pour les grandes que pour les petites structures. Montrer aux jeunes diplômés que l’on peut être dans l’industrie agroalimentaire mais pour autant avoir le souci de notre impact écologique, territorial et sociétal.

En effet, l‘industrie agroalimentaire contribue à plus d’un tiers des émissions de gaz à effet de serre en France. Du côté de l’environnement, les entreprises ont vraiment un rôle à jouer en adoptant par exemple une politique « zéro déchet » grâce par exemple à la méthanisation qui permet d’éliminer la pollution organique en consommant peu d’énergie, et de produire une énergie renouvelable : le biogaz. Elles peuvent aussi faire le choix de donner les produits non conformes à des associations.

Les entreprises peuvent travailler sur leurs emballages pour diminuer ceux qui sont polluants et trouver des filières qui soient recyclables. La réduction des plastiques passe par nos salariés en leur distribuant par exemple des gourdes réutilisables pour leur consommation d’eau au sein de l’entreprise et la mise en place de distributeurs d’eau filtrée pour favoriser la santé des collaborateurs.

Pour ce qui est des territoires, les entreprises peuvent encourager l’achat des matières premières dans un rayon de 100km pour limiter les transports de marchandises et encourager par ce biais l’économie locale.

En terme social, la RSE peut s’inviter dans tous les domaines de la GRH, du recrutement, au management, en passant par la formation, en intégrant et encourageant des valeurs telle que l’écoute, la bienveillance, la non-discrimination, la coopération.

Lors du recrutement, l’engagement RSE doit également être explicité afin d’attirer des candidats qui partagent ces mêmes valeurs et doit transparaitre dans le processus. Un recrutement basé sur l’éthique est un bon moyen de communiquer naturellement sur sa politique RSE. Pour mener un recrutement de façon éthique, le recruteur remet en cause ses propres croyances plutôt que de chercher à les imposer à autrui et est amené à réfléchir sur les conséquences de ses actes de recrutement, les causes de ses décisions d’embauche, le plus souvent influencées par ses croyances.

Enfin, toutes les actions liées à la qualité de vie au travail entrent dans le champ d’une politique RSE et peuvent être valorisées dans ce cadre. Le bien-être au travail s’il est ressenti par l’ensemble des salariés permet alors d’attirer de jeunes diplômés car les collaborateurs deviennent les meilleurs ambassadeurs de l’organisation. Soigner la façon dont on traite ses salariés est le premier pas vers l’attractivité.

L’engagement RSE est un premier grand axe de travail sur le long terme. Une réflexion sur les attentes de la nouvelle génération de diplômés, dit génération Z, en est un autre.

FOCUS : les attentes de la génération Z

 

Les envies de la génération Z sont bien différentes des générations des années 80-90. Aujourd’hui, les jeunes diplômés n’ont que faire du statut, ils préfèrent mettre du sens dans leur métier.

• Le diplôme jugé non essentiel 

Les jeunes étudiants vont privilégier leur épanouissement personnel comme partir en voyage, quitte à sacrifier une partie de leur scolarité. Le statut cadre et les grandes écoles ne séduisent plus autant qu’avant et les jeunes diplômés n’ont plus peur de vivre de leur passion. Aujourd’hui, les métiers manuels, et notamment l’artisanat, ont vu leur blason redoré. En effet, des milliers de jeunes de niveau bac+5 déçus par le marché du travail choisissent chaque année de se réorienter vers des métiers manuels. Une conclusion qui montre qu’une partie de la jeune génération est prête à se retrousser les manches et à utiliser ses mains plutôt que de faire un travail qu’elle juge inutile. C’est l’occasion pour nos entreprises d’attirer des profils inhabituels, comme des étudiants sortis d’école même sur des métiers non qualifiés.

 

• Plus une seule carrière mais plusieurs

Selon une étude menée par KPMG en 2017 sur des jeunes diplômés, seuls 23 % des sondés estiment probable ou très probable de travailler pour la même entreprise durant toute leur carrière. Ils commencent les études en suivant une voie, on finit par une autre. Ces réorientations précoces de jeunes diplômés constituent « un phénomène non négligeable », écrit l’Association pour l’emploi des cadres (APEC) dans une enquête publiée en 2015 ; 14 % des jeunes diplômés de niveau bac+5 ou plus (environ 4 700 ont répondu au questionnaire) déclaraient avoir vécu un changement significatif d’orientation professionnelle dans les deux années suivant l’obtention de leur diplôme. 6 ans plus tard, ces réorientations sont encore plus d’actualité, il suffit de voir le nombre de demandes de CPF (Compte Personnel de Formation) qui a doublé depuis le confinement.

• À la recherche d’une qualité de vie 

La génération Z est marquée par le terrorisme, les crises sanitaires et les questions climatiques, elle est de fait plus prudente et réaliste que la génération Y, mais aussi moins insouciante. C’est aussi pour cette raison que les Z vont mettre un point d’honneur à trouver, dans leur travail, une certaine qualité de vie. A commencer par leur environnement de vie. Aujourd’hui, les jeunes diplômés savent que le télétravail est possible et qu’ils peuvent choisir d’habiter où bon leur semble. Ils n’hésiteront pas à privilégier le travail qui leur garantit la meilleure qualité de travail dans un environnement agréable. Avec le confinement, la campagne attire de plus en plus de monde. L’occasion pour les entreprises isolées de mettre en avant les caractéristiques tranquille et reposant de leur environnement.

• Priorité à l’équilibre vie privée – vie professionnelle

Pour les Z, l’idéal c’est d’être dans une entreprise qui leur permettent d’avoir du temps libre pour faire ce qui les animent. Selon Great Place To Work, ils sont plus de 60 % à considérer qu’un mauvais équilibre entre vies personnelle et professionnelle constitue un véritable frein dans leur travail (vs 40 % pour la génération Y).

Aujourd’hui, l’envie de se réaliser ailleurs que sur son lieu de travail est important. En effet, ils ne se retrouvent plus forcément dans les valeurs que sont la performance, la continuité et la persévérance et seraient plutôt portés par les valeurs telles que le respect, l’agilité, la coopération, et la transparence.

• Le management comme une relation de partenariat plutôt qu’un lien de subordination.

Selon YouGov, 35 % des 18-24 ans refuseraient un emploi s’ils ne s’entendent pas avec leur manager. Ils voient dans leurs managers prioritairement des facilitateurs et des coachs et ne veulent plus avoir de lien hiérarchique strict et autoritaire. Ils ont besoin d’être en confiance de pouvoir exprimer leur ressenti sur ce qu’ils vivent.

 

Conseils pour s’adapter à la génération Z et les attirer :

1. Etendre son recrutement à la France entière

Depuis la crise sanitaire et avec le développement du télétravail, les employeurs peuvent étendre leur recrutement sans se contenter de communiquer sur leurs offres d’emploi dans leur réseau local. Pour cela, on peut aussi étendre les partenariats avec des écoles sur toute la France !

Les étudiants français sont plus mobiles que la moyenne internationale. Ainsi, 95 % des jeunes Français se disent prêts à déménager régulièrement pour leur travail, contre 89 % pour la moyenne internationale. Cette génération est plus qu’ouverte à la mobilité. En pratique, le recruteur peut diffuser largement ses offres sur les réseaux sociaux et les différents canaux de recrutement sans restreindre à la ville où elle est implantée.

2. Proposer une organisation de travail flexible

L’un ne va pas sans l’autre. Si les jeunes sont mobiles, c’est parce qu’ils veulent pouvoir travailler où bon leur semble, pour leur permettre de vivre où ils souhaitent. Pour cela, l’entreprise doit encourager une organisation flexible avec des possibilités de télétravail même à 100%, selon les profils.

On l’a vu, la génération Z ne recherche plus dans l’entreprise un épanouissement total. Elle veut s’épanouir dans sa vie plus largement. Pour cela, quand les métiers le permettent, l’entreprise doit renoncer à son désir de créer un lien absolu entre ses salariés et doit leur salariés un certain degré de liberté, tant au niveau des horaires et que de son lieu de travail. L’entreprise doit encourager un bon équilibre vie professionnelle/personnelle.

3. Mode de management basé sur la confiance

Ce qui nécessite à tout prix d’instaurer des modes de management basés sur la confiance et sur la transparence, en mettant en valeur les résultats plutôt que les moyens pour arriver à ces résultats. Pour cela, les salariés doivent être encouragés à se détacher des créneaux horaires classiques et les managers doivent accepter les différents rythmes et besoins des collaborateurs. L’important, c’est que le travail soit bien fait, peu importe comment le collaborateur est arrivé à le faire.

Établir une relation de confiance stimulante, privilégier la responsabilisation plutôt que le contrôle, concevoir l’organisation comme une responsabilité partagée, et choisir la collaboration plutôt que les statuts et l’autocratie. Ce mode de management basé sur la confiance peut s’appliquer pour tous les types de métiers.

4. Lors du recrutement, remettre en question ces idées reçues

Aujourd’hui, un candidat avec de nombreuses expériences ou un parcours décousu ne signifie pas forcément qu’il est instable. Cela peut dire que le candidat est curieux, qu’il a vécu des expériences enrichissantes pour son développement personnel, qu’il a su rebondir après des échecs… Au regard des attentes de la génération Z évoquées précédemment, un recruteur doit réussir à mettre de côté ces croyances devant des CV atypiques. Aussi, voici quelques règles d’or à respecter lors du recrutement : s’assurer d’une relation équilibrée entre les parties prenantes, encourager la diversité des profils, remettre ses pratiques de recrutement régulièrement en question, intégrer des pratiques innovantes en terme de recrutement.

5. Être proactif dans le recrutement

Au regard des attentes de la génération Z, les recruteurs ne doivent pas avoir peur d’aller dans des salons d’étudiants généralistes pour recruter même sur des métiers moins qualifiés mais plus manuels pour atteindre les jeunes fraichement diplômés déjà en quête de reconversion.

Aussi, les recruteurs doivent créer des partenariats avec les collèges et lycées pour faire connaître les métiers de l’agroalimentaire. Proposer des stages, aller dans des salons pour présenter ses métiers, inviter des classes à visiter les entreprises, créer des partenariats avec des écoles de quartiers défavorisés. Il faut faire tomber les murs entre les écoles et les entreprises pour aller chercher les futurs diplômés bien en amont. Et même si les petites structures aujourd’hui attirent plus car elles correspondent à première vue aux projets à taille humaine recherchés par les générations Z, les plus grandes entreprises ne doivent pas rougir, elles ont aussi des atouts à mettre en avant : des possibilités d’évolution de carrière et salariale, des projets variés, des moyens plus importants.

6. Multiplier les canaux de communication

Aujourd’hui, pour attendre les nouvelles générations des jeunes diplômés, les entreprises peuvent être présentes sur des plateformes de recrutement modernes comme les réseaux sociaux LinkedIn et même Instagram ou Tiktok et oser utiliser un ton un peu plus léger, voire humoristique. Et quoi de plus vendeur que de faire parler ses salariés sur leur vision de l’entreprise et des métiers.

La communication passe aussi par la mise en avant d’actions concrètes effectuées par les entreprises pour améliorer la qualité de vie des salariés, par exemple,  l’investissement pour prévenir les TMS, l’aménagement d’une salle de pause, la mise en valeur du territoire dans lequel se trouve l’entreprise, ou toutes autres actions pour faciliter la vie des salariés sont autant de sujets sur lesquels les entreprises peuvent communiquer même en externe, via les réseaux sociaux notamment.

Ne pas hésiter à utiliser d’autres supports que les sites de recrutement classiques. Par exemple, les entreprises peuvent essayer de recruter parmi leurs clients, en utilisant leur emballage ou via leurs canaux de distribution.